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CCI

Changer l’industrie technologique en Afrique

Haifa Ben Salem et Evelyn Seltier, International Trade Centre

Le Forum du commerce s’est entretenu avec deux start-up technologiques africaines qui ont participé en février 2023 au salon Mobile World Congress de Barcelone grâce l’appui du Centre du commerce international et de l’association GSMA. Cet événement est le plus important au monde en matière de téléphonie mobile ; il a rassemblé plus de 88 500 opérateurs télécom, entrepreneurs, entreprises et institutions publiques.
Le salon a été l’occasion pour les jeunes entreprises de saisir des opportunités commerciales et de présenter la technologie africaine au-delà du continent. La technologie favorise l’inclusion financière et connecte les gens aux services numériques. C’est particulièrement le cas en Afrique, où une grande partie de la population n’a pas accès aux banques traditionnelles.
Emmanuel Emodek, Directeur général de ChapChap en Ouganda, et Bright Chinyundu, Fondateur de Sparco en Zambie, reviennent sur cette expérience mémorable.

Bright, vous avez largement brillé à ce Congrès avec votre société Sparco en remportant le concours mondial de pitch ouvert aux entreprises de technologie financière.

Qu’est-ce que votre solution technologique apporte aux petites entreprises ?

Nous offrons des solutions bancaires numériques aux petites entreprises africaines et leur donnons accès aux marchés internationaux.

Nous leur fournissons les moyens d’accepter les paiements digitaux. La nature de ces entreprises est plutôt variée : il y a des boutiques de vêtements, des galeries d’art africain, des pâtisseries, des fleuristes, et d’autres encore.


Emmanuel, qu’est-ce que ChapChap ?

Nous sommes une fintech qui crée des profils financiers pour les petits commerces de détail grâce aux données collectées à partir des registres de transactions effectuées sur notre application. Nous créons ainsi des profils financiers pour des entreprises informelles, ce qui leur permet d’accéder à des prêts auprès d’institutions financières.

Comment connectez-vous ces petites entreprises aux solutions numériques ?

Nous établissons des partenariats avec des institutions financières, des entreprises télécom et des fintechs, et nous étendons la portée de leur offre de services par le biais des petites entreprises. Bon nombre de ces petites entreprises offrent déjà des services aux personnes à faible revenu qui viennent y acheter des produits d’épicerie ou d’autres petits articles ménagers. Avec ChapChap, les clients qui n’ont pas accès aux services bancaires traditionnels peuvent recharger leur portefeuille numérique ou retirer de l’argent, régler leurs factures aux services publics ou payer pour les frais de scolarité de leurs enfants. Les possibilités sont énormes.


Avez-vous déjà constaté un impact ?

ChapChap aide les propriétaires de petites entreprises à gagner de l’argent en fournissant des services digitaux à leurs clients, et pour chaque service vendu, le propriétaire perçoit un revenu sous la forme d’une commission. Jusqu’à présent, nous avons versé près de 2,2 millions de dollars de commissions aux entreprises avec lesquelles nous travaillons. En analysant les données transactionnelles générées par notre plateforme, nous pouvons aider les institutions financières à évaluer la solvabilité des entreprises et à leur accorder des prêts. À ce jour, les entreprises avec lesquelles nous travaillons ont obtenu plus de 14 millions de dollars de crédit grâce à notre plateforme.


Bright, quels sont les défis spécifiques à la création d’une start-up technologique ?

La réglementation est le premier problème à résoudre, pour que la banque centrale approuve les opérations de l’entreprise. Ensuite, c’est la recherche de talents. Vous avez besoin de personnes dévouées, et ce n’est pas facile de les dénicher.

Le fait que nous ne soyons pas une start-up subventionnée se traduit aussi par la difficulté à retenir le personnel. Nous recrutons de jeunes diplômés, nous les formons, puis les grandes entreprises les séduisent et les débauchent.

Qu’est-ce qui vous a aidé ?

La résilience et le fait que je sois ingénieur en informatique. Je peux intervenir dans l’écriture des programmes en cas de départ d’un développeur.


Quels sont vos projets pour ChapChap, Emmanuel ?

Nous prévoyons de développer notre réseau d’agents de monnaie mobile, principalement en établissant des partenariats avec des petites entreprises.

De plus, nous avons l’intention de nous étendre à toute l’Afrique en collaborant avec des partenaires qui mènent déjà des opérations similaires dans d’autres pays africains. Nous pensons que cela nous permettra de surmonter les divers obstacles réglementaires et les complexités qui découlent du fait d’opérer sur le marché africain.

De quoi auriez-vous besoin pour que cela se produise ?

Des talents techniques, des logiciels améliorés, des financements et des partenariats solides.


Bright, quel est votre conseil aux autres start-up technologiques ?

Créez les produits que les gens réclament.

L’argent est un avantage supplémentaire, mais la bonne mentalité c’est de vouloir changer des vies et créer les produits que les gens veulent. C’est comme ça que vous mettez en route la mécanique.


Sparco et ChapChap sont en train de changer l’industrie technologique en Afrique en résolvant des problèmes systémiques tels que l’absence d’accès au crédit par manque d’évaluation de la solvabilité, la non intégration au système bancaire d’une large partie de la population, et une profonde fracture numérique.

Les deux entreprises ont été sélectionnées pour participer à la fameuse compétition Fintech Battle lors du Mobile World Congress, où elles ont affronté des start-up autrichiennes et espagnoles. C’est Sparco qui a remporté l’épreuve, ce qui s’est traduit par un gain considérable de visibilité, d’un accès à l’édition 2024, et d’une mise en réseau avec des investisseurs.

La participation de ces start-up au Congrès s’est faite grâce à deux initiatives du Centre du commerce international, les programmes Netherlands Trust Fund V (NTF V) et FastTrackTech-SwitchOn. Ces deux programmes ont pour objectif d’appuyer les petites entreprises dans les secteurs des technologies numériques, de la connectivité et de l’agroalimentaire.

À cet égard, les projets suivants sont menés : contribuer à la transformation inclusive et durable des systèmes alimentaires, en partie grâce à des solutions numériques ; aider les décideurs politiques à créer les conditions adéquates pour que les petites entreprises des pays en développement tirent parti du commerce numérique et de l’entrepreneuriat ; et stimuler l’internationalisation des start-up technologiques et l’exportation d’entreprises informatiques d’externalisation des processus commerciaux.

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